Les troubles bipolaires (lundi, 06 décembre 2010)
Une définition des troubles bipolaires par BRYSTOL-MYERS SQUIBB
Santé Mentale
Les troubles de l’humeur (appelés dysthymies) correspondent à une perte de capacité d’un individu à contrôler ses affects, son humeur. En cas de dérèglement, l’humeur peut ainsi varier dans des proportions anormales.
Les troubles bipolaires sont des troubles de l’humeur regroupant des symptômes pouvant aller de l’état dépressif à l’accès maniaque, en passant par tous les stades intermédiaires. Il s’agit d’une maladie chronique.
L’humeur peut subir des variations plus ou moins importantes de part et d’autre d’un état d’humeur « normal » (que l’on pourrait représenter par une ligne médiane).
Ce schéma représente une façon d’interpréter les troubles bipolaires aujourd’hui telle qu’admise par l’American Psychiatric Association. [1]
Épidémiologie
En France, les troubles bipolaires touchent entre 1,2% et 5,5% de la population générale
Dans le monde, leur fréquence varie selon les pays de 0,2% (Canada) à 5,1% (Hongrie) [3]
- 0,5% en Amérique latine et en Asie
- v1,5% en Amérique du Nord et en Europe
Les femmes sont autant touchées que les hommes
La maladie peut débuter à des âges variables :
- L’âge des premiers symptômes n’excède pas 15 ans dans un tiers des cas [4]
- Ils se situent entre 15 et 19 ans dans 27% des cas et surviennent au-delà de 20 ans dans 39% des cas. [5]
- Les troubles bipolaires débutent chez l’adulte jeune. Selon le NICE (National Institute for Health and Clinical Excellence), le premier épisode survient avant 30 ans. Avec un âge moyen de 17 – 29 ans et un pic à l’adolescence de 15 à 19 ans [6].
Selon l’OMS, les troubles bipolaires sont la sixième cause de handicap chez les personnes de 15 à 44 ans. Source de difficultés chez l’adulte jeune, ils font partie des 10 causes majeures de handicap et de surmortalité reconnues dans le monde.
Symptômes de la maladie
La forme classique des troubles bipolaires consiste en une alternance d’accès dépressifs et d’accès maniaques, entrecoupés de périodes d’état normal. Il peut exister différentes formes cliniques, avec prédominance d’un pôle ou de l’autre, et des symptômes d’intensité variable (en passant par tous les stades de gravité).
Le diagnostic est rendu difficile lorsqu’il existe des formes atténuées, ou des formes où les symptômes sont essentiellement dépressifs.
Dans les troubles bipolaires on peut voir des symptômes dépressifs, hypomaniaques, ou maniaques.
L’épisode dépressif majeur [7]
L’épisode dépressif majeur témoigne d’un affaissement douloureux de l’humeur qui affecte les différentes sphères de la vie psychique, la cognition, les émotions, la motricité mais aussi les rythmes vitaux du sommeil et de l’appétit, ou la capacité à éprouver du plaisir et l’image de soi. Les symptômes qui sont le reflet de cette affection induisent une souffrance cliniquement significative ou une altération du fonctionnement socioprofessionnel.
L’épisode maniaque [7]
L’épisode maniaque correspond, pour sa part, à l’occurrence d’une période nettement délimitée durant laquelle l’humeur est élevée de façon anormale et persistante pendant au moins une semaine.
Au cours de cette période, il existe une atteinte des mêmes domaines que dans l’épisode dépressif majeur, mais seulement trois symptômes sur une liste de sept sont nécessaires au diagnostic d’épisode maniaque, accompagnés d’une altération marquée du fonctionnement professionnel, des activités sociales ou des relations interpersonnelles :
l’humeur est élevée de façon anormale et persistante, expansive ou irritable, clairement différente de l’humeur non dépressive habituelle, et ce tous les jours pendant au moins 4 jours.
augmentation de l’estime de soi oui idées de grandeur.
réduction du besoin de sommeil
plus grande communicabilité que d’habitude ou désir de parler constamment.
fuite des idées ou sensations subjectives que les pensées défilent.
distractibilité (p. ex., l’attention est trop facilement attirée par des stimulus extérieurs sans importance ou insignifiants).
augmentation de l’activité orientée vers un but (social, professionnel, scolaire ou sexuel) ou agitation psychomotrice.
engagement excessif dans des activités agréables mais à potentiel élevé de conséquences dommageables (p. ex., la personne se lance sans retenue dans des achats inconsidérés, des conduites sexuelles inconséquentes ou des investissements commerciaux déraisonnables).
L’épisode hypomaniaque [7]
L’épisode hypomaniaque se distingue de l’épisode maniaque par sa durée (au moins quatre jours) et par une altération moindre du fonctionnement global.
Durant cette période de perturbation de l’humeur, au moins 3 des symptômes décrits dans l’épisode maniaque persistent avec une intensité significative.
De façon plus globale, les troubles bipolaires présentent des symptômes répartis en quatre catégories [8] :
Symptômes touchant l’humeur :
- Jovialité, euphorie, exaltation, mégalomanie
- Hostilité, tristesse, irritabilité, anxiété
- Sentiment de dévalorisation
Symptômes affectant les fonctions intellectuelles :
- Accélération de la pensée (surexcitation psychique),
- Fuite des idées (succession rapide d’idées associée à un discours incohérent)
- Inhibition
- Difficulté d’attention et de concentration, troubles de la mémoire, perte d’énergie psychique
Troubles du comportement :
- Agitation, hyperactivité, important débit de parole
- Ralentissement, fatigue, inhibition
- Anorexie/boulimie
- Insomnie ou augmentation/diminution du besoin de sommeil
- Désinhibition sexuelle
- Violence, suicide
Symptômes psychotiques :
- Délires, hallucination
Pathologies associées
[9]
Il est très fréquent que les troubles bipolaires soient associés à une autre pathologie qui peut interférer et retarder leur diagnostic. La fréquence de cette association peut aller jusqu’à 65%.
Ces pathologies sont :
Abus et dépendance aux substances toxiques, particulièrement l’alcool, mais aussi la cocaïne, le cannabis, les opiacés, les amphétamines.
Trouble déficit de l’attention/Hyperactivité (chez l’enfant et l’adulte)
Troubles anxieux
Troubles obsessionnels compulsifs (TOC)
Troubles du contrôle des impulsions (kleptomanie, pyromanie, jeu pathologique)
Troubles de la personnalité (traits de caractères rigides ou inadaptés)
Troubles du comportement alimentaire
Il est important de rechercher ces pathologies lorsqu’on soupçonne des troubles bipolaires et inversement, de rechercher des troubles bipolaires lorsqu’un patient présente une de ces pathologies.
Facteurs de risque
Il existe des facteurs pouvant influencer le développement des troubles bipolaires. Ces risques peuvent être génétiques et/ou sociaux.
Facteurs de risques génétiques
En effet, si un membre de la famille souffre d’un trouble bipolaire le risque de développer la maladie est de :
40% à 70% si c’est un jumeau monozygote
10% si c’est un frère ou une sœur
5% à 10% si c’est un parent de premier degré (vs 1% dans la population générale).
Facteurs de risques sociaux
Des facteurs de risques sociaux tels que des événements de vie stressants (problèmes familiaux, conjugaux, professionnels) et l’altération des rythmes peuvent favoriser le développement des troubles bipolaires.
Retentissement professionnel et familial et social
Les troubles bipolaires peuvent être responsables de précarité professionnelle ou de chômage, du fait des arrêts de travail répétés ou des licenciements. De même, les patients plus jeunes peuvent se retrouver en situation d’échec scolaire.
La vie familiale est perturbée de façon importante, tant en ce qui concerne les relations entre conjoints que les relations parents-enfants, ou avec la famille au sens plus large.
Le comportement du patient lors des phases maniaques (dépenses excessives, mauvaise gestion) peut provoquer des difficultés financières. Il peut aussi l’amener à être impliqué dans des actes délictueux ou des situations conflictuelles avec son voisinage.
Traitement
[12]
L’objectif du traitement des troubles bipolaires est de ramener l’humeur à un état normal, puis de prévenir les récidives d’états maniaques ou d’épisodes dépressifs.
La prise en charge des troubles bipolaires a beaucoup évolué ces dernières décennies. Il y a plus de 50 ans, les médecins n’avaient à leur disposition que peu de traitements médicamenteux.
Les thymorégulateurs (ou stabilisateurs de l’humeur) sont destinés à réguler les troubles de l’humeur, ils comportent plusieurs classes de médicaments dont certains antiépileptiques ;
Les antipsychotiques sont indiqués dans le traitement des épisodes maniaques aigus et préviennent, en fonction des molécules, la réapparition de nouveaux épisodes.
Le traitement de la maladie bipolaire nécessite une approche curative et préventive.
La prise en charge thérapeutique des épisodes maniaques dans les troubles bipolaires comporte deux pôles de traitement :
Le traitement de la crise, destiné à soulager le patient, de façon rapide, efficace et maintenue.
Le traitement de fond, préventif ou prophylactique, a pour objectif de prévenir la réapparition de nouveaux épisodes.
Cette efficacité thérapeutique est le préalable nécessaire et indispensable à tout travail de restauration sociale, familiale et professionnelle. Certains médicaments sont tout à la fois curatifs à action rapide et prophylactiques. Ce double potentiel se révèle très précieux pour les patients. Ils peuvent ainsi garder le même traitement tout au long de leur maladie et cette simplicité constitue un atout en termes d’observance thérapeutique.
Parce que les troubles bipolaires évoluent sur un mode chronique et récidivant, il est important de tenir compte de la tolérance des médicaments. La survenue des effets secondaires est la principale cause d’un arrêt de traitement, et, en corollaire, de rechute.
Thérapies complémentaires
Parallèlement à la prescription de médicaments, l’application de règles d’hygiène de vie (respect d’une quantité d’heures de sommeil et des rythmes sociaux…) et l’institution d’une prise en charge psychothérapique sont nécessaires.
La psychothérapie améliore notamment la qualité de l’observance et apporte un soutien nécessaire au patient et à son entourage. Dans certains cas, la une psychothérapie spécifique peut être justifiée.
Pour en savoir plus, consultez le Guide Affection de Longue Durée – Troubles Bipolaires de la HAS – 2009.
[1] Source : American Psychiatric Association Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders, 4th edition, text revision (DSM-IV-TR). American Psychiatric Press ; 2000:382–401 ; Goodwin and Jamison. Manic-Depressive Illness. New York : Oxford University Press, 1990 ; World Health Organization International Statistical Classification of Diseases and Related Health Problems, 10th Revision. Online Version for 2007. Available at : http://www.who.int/classifications/....
[2] M de Zélicourt, et al. Les troubles bipolaires en France. L’Encéphale 2003 ;XXIX:248-53, cahier 1.
[3] Slama F. Epidémiologie des troubles bipolaires de l’humeur. Rev Prat, 2005 ; 55:481-5.
[4] Etude ECHO : Hirschfeld RMA, Lewis L, Vornik LA (2003). Perceptions and impact of bipolar disorder : how far have we really come ? Results of the national depressive and manic-depressive association 2000 survey of individuals with bipolar disorder. J Clin Psychiatry, 64 : 161-174 )
[5] Etude ECHO : Morselli PL and Elgie R. (2003) - GAMIAN-Europe/BEAM survey : I - Global analysis of a patient questionnaire circulated to 3450 members of 12 European advocacy groups operating in the field of mood disorders ; Bipolar Disorders, 5, 265-278.
[6] Nice 2007 - National Institute for Health and Clinical Excellence
[7] Azorin JM. Qu’est-ce que le trouble bipolaire ? L’Encéphale, 2006, Vol. 32, n° 4, Part 2, 489-496
[8] Chiaroni P. Aspects cliniques et diagnostic des troubles bipolaires. Rev Prat 2005 ;55:493-9.
[9] Lipski H, Baylé F. Troubles bipolaires et comorbidité psychiatrique. Rev Prat 2005 ;55:501-6.
[10] Müller–Oerlinghausen B, et al. Bipolar Disorder, Lancet 2002 ; 359 :241-7
[11] Lish JD et al. The National Depressive and Manic-Depressive Association (DMDA) survey of bipolar members. J Aff Dis 1994, 31-281-94.
[12] Gay C, Olié JP. Prise en charge des troubles bipolaires. Rev Prat 2005 ;55:513-22.
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